Comprendre et traiter les crampes musculaires - par Rachid ZIANE (extrait de sport et santé - Illustration

Comprendre et traiter les crampes musculaires - par Rachid ZIANE (extrait de sport et santé

17 Jan. 2022

Tout n’a pas été dit au sujet des crampes musculaires

Tout n’a pas été dit au sujet des crampes musculaires, d’autant que des découvertes plus récentes éclairent ce phénomène musculaire. Pour autant, des croyances persistent et sont diffusées de génération en génération d’entraîneurs et de sportifs, parfois avec des confusions avec les courbatures.
Quels sont les différents types de crampes ? Comment se produisent-elles ? Comment les prévenir et les traiter ?

Définition et mécanisme

Si les définitions sont quasi-univoques, il existe cependant différents types de crampes et différentes classifications.

Pour Bacquaert (2014), une crampe est « une contraction involontaire, brutale, intense et douloureuse d’un muscle ».

Selon cet auteur, la douleur serait due à l’augmentation brutale de la pression intramusculaire entraînant « un "infarctus" transitoire du muscle » (Ibid). Le terme infarctus est entendu ici au sens d’ischémie ou arrêt de la vascularisation locale, lequel entraînerait une hypoxie locale par diminution de l’oxygénation et un empoisonnement musculaire par l’arrêt de l’élimination des déchets métaboliques anaérobies.

Il s’agirait plus précisément de contractures ou « spasmes énergiques et soutenus » (Fahri, 2018).

Les crampes concerneraient le plus souvent les muscles fléchisseurs et impliqueraient « une partie d’un muscle, le muscle entier, ou plusieurs muscles » (Farhi, Ibid).

Des explications scientifiques plus fines conduisent à diverses classifications des crampes.

Différentes classifications

Les différentes classifications s’appuient sur des explications plus ou moins hypothétiques suggérant diverses solutions.

Crampes sportives et crampes nocturnes



Cette distinction faite par certains auteurs (e.g. : Gruffat, 2021) nous semble, toutefois, peu pertinente. En effet, même si des personnes non-sportives peuvent avoir des crampes nocturnes, celles-ci peuvent être consécutives à un entraînement en journée. Par ailleurs, des personnes sédentaires peuvent aussi être sujettes à des crampes en journée. La classification suivante semble alors plus pertinente.

Crampes au repos et crampes à l’effort, chez les sportifs (dixit Bacquaert, Op.cit)

·         Les crampes à l’effort apparaîtraient avec la fatigue.

·         Les crampes au repos seraient le plus souvent nocturnes.

Crampes essentielles et crampes secondaires (Serratrice, 2008)

·         Les crampes essentielles seraient idiopathiques, c’est-à-dire sans cause apparente. Aussi, pour chaque cas précis les explications restent hypothétiques : une fatigue musculaire consécutive à une activité physique et/ou une position inconfortable maintenue longtemps, un état de déshydratation, un manque de sodium, de calcium, de potassium ou de magnésium, un excès de consommation d’ergogènes (café, thé) ou d’alcool ou encore une hyperglycémie.

·         Les crampes secondaires résultent, quant à elles, d’un déficit installé en potassium, magnésium ou calcium voire hydrique et/ou sodique non compensé (sudation), d’une hypoglycémie réactionnelle ou non, d’une forte chaleur voire d’un coup de chaleur, de varices, d’une maladie (rénale, thyroïdienne, sclérose en plaque, affection d’un nerf), de consommation de médicaments (diurétiques, laxatifs, statines, bêta-bloquants, corticoïdes…) ou d’alcool.

Les crampes essentielles touchent le plus souvent les sportifs mais aussi les personnes âgées. En effet, même si elles existent chez l’enfant, les crampes sont de plus en plus fréquentes avec le vieillissement.

Que les crampes soient essentielles ou secondaires, le manque de sodium (Farhi, 2009) conduit les cellules musculaires à activer anormalement leur pompe à calcium entretenant alors la contraction musculaire.

Crampes musculaires dites "vraies", crampes de la tétanie, contractures musculaires, crampes dystoniques (Farhi, 2018) 

·         Les crampes musculaires dites "vraies", comprenant les crampes de repos dont celles nocturnes.
Elles résulteraient d’une hyperexcitabilité des nerfs qui stimulent les muscles, pour des causes variées telles que blessure, activité intense, déshydratation, hyponatrémie, hypokaliémie, hypo ou hyper calcémie ou magnésie, répartition inhabituelle des liquides de l’organisme.

·         Les crampes de la tétanie
Toutes les cellules nerveuses de l’organisme sont activées et stimulent alors les muscles, provoquant des crampes dans tout le corps et peuvent aussi être dues à une hypokaliémie ou une crise de tétanos, imposant une prise en charge médicale d’urgence.

·         Les contractures musculaires
Elles peuvent être dues à un déficit en adénosine triphosphate (ATP) ou à une maladie héréditaire comme celle de McArdle ou acquise telle qu’une hyperthyroïdie.

·         Les crampes dystoniques
Elles touchent les muscles antagonistes aux mouvements et/ou des muscles synergiques des mouvements.

Cependant et comme le signale Farhi (Ibid), ces catégories ne sont pas totalement exhaustives.

Crampes vs courbatures

Elles sont souvent confondues par de nombreux sportifs.

Les crampes sont des contractions spontanées violentes et très douloureuses pouvant durer de quelques secondes à un quart d’heure (Farhi, Op. cit).

Consécutives à des efforts inhabituels en durée et/ou en intensité, les courbatures sont des douleurs plus ou moins durables dues à des microlésions tissulaires (fissurations des enveloppes ou aponévroses des muscles, de leurs loges et/ou de leurs faisceaux) et cellulaires (arrachement de têtes de myofilaments de myosine), avec présence de déchets métaboliques plus ou moins acides, à l’origine d’un état inflammatoire local.

S’il est urgent de faire cesser une crampe, les courbatures disparaitront d’elles-mêmes avec le repos.

Prévention

En amont des compétitions, la préparation physique doit être pensée en envisagent son rôle prophylactique, en préparant progressivement l’organisme à produire des efforts de durée et d’intensité croissantes parfois dans des conditions extrêmes (trail, triathlon, raid…). La progressivité devra être pensée sur toutes les échelles de temps de l’entraînement.

L’échauffement en est l’illustration. Il devra être progressif et l’attention devra être portée en direction des ressentis cherchant à identifier toute anomalie à palier.

A l’effort, l’hydratation et le ravitaillement réguliers devront être programmés et respectés sans attendre l’apparition des premiers signes de déficits tels que la soif ou la fringale… ou la crampe !

Par ailleurs, l’exposition au froid, générale ou locale, augmente les risques de crispation.

Traitement

Ce qui était connu du plus grand nombre a été confirmé « l'étirement du muscle touché soulage souvent la crampe » (Levin, 2019). Ceci est finalement peu étonnant, car s’il est bien un effet reconnu des étirements, c’est celui d’inhiber la contraction musculaire et ainsi de permettre le relâchement.

Pour autant et avec la prolifération des accessoires d’entraînement et de récupération, certains ont suggéré que les massages à l’aide d’un rouleau spécifique seraient plus efficaces, allant jusqu’à remettre en question l’efficacité des étirements.

Sans recourir à un tel accessoire, l’idéal semble être l’alternance répétée d’étirements intenses et prolongés (plus de 30 secondes) et de massages profonds des muscles crispés, allant des extrémités vers le cœur ; ce sens évitant de créer des varices. Il faudra en même temps et si nécessaire, palier tout déficit hydrique, glucidique et minéral (eau minérale, soupes de légumes…).

 Farhi  suggère trois gestes simples pour soulager rapidement les douleurs dues aux crampes :

1.    arrêter l’effort physique,

2.    massage doux du muscle contracté,

3.    boire un verre d’eau sucré.

Et, pour éviter leur recrudescence

1.    s’échauffer de manière correcte,:

2.    s’hydrater abondamment avant, pendant et après la pratique sportive, 

3.    Apporter à l’organisme des électrolytes (sels minéraux) sur le long terme.
Conclusion

En médecine, il est souvent question de diagnostic différencié. En l’occurrence, en cas de doute et comme le suggère Bacquaert (Op. cit.), il convient de différencier la crampe du syndrome des loges, d’un accident musculaire ou même d’une "béquille". Si les crampes sont récurrentes, il faudra consulter un médecin pour écarter toute cause pathologique par une consultation médicale.

Ensuite, que ce soit à titre préventif ou curatif, l’hygiène de vie (hydratation, alimentation et étirements, récupération, progressivité à l’effort) doit être rationnalisée.

Enfin et comme le signale Farhi (Op. cit), les muscles striés squelettiques, c’est-à-dire ceux des mouvements volontaires, ne sont pas les seuls à être potentiellement sujets aux crampes : «  Les muscles involontaires de divers organes (utérus, paroi des vaisseaux sanguins, le tractus intestinal, la vésicule biliaire et voies urinaires, arbre bronchique, etc.) sont également sujets à des crampes […] communément spasmes ».